Godzenbuth, dans sa quête ascensionnelle,

gambadait joyeusement parmi la faune sensuelle

qui peuplait cette contrée licencieuse.


De temps à autre, des personnages croulant déboulaient la pente,

roulant et tourneboulant  sur les rochers.


Au détour d'une treille – car la montagne était bien raide,

 il aperçut un vieil homme juché sur un âne moqueur.

Son regard était perçant, mais lui et son âne pas très clinquants


« Dis-moi, l'Ancien des jours »,  lança Godzenbuth,

« que sont ces choses qui déboulent d'un air maboule ? »


« Les premiers », me dit-il, « ont comme un élastique

accroché au dos de leur ceinture, qui toujours les projette en contrebas, quelque soient leurs efforts et leur persévérance têtue.

En fait, ils sont incapables de s'élever,

tant ils sont imbus de leur vaine personnalité.

Ils sont perdus par leur propre nature.


« Les deuxièmes, vois-tu, ont cru se dégager des contingences

par le mépris d'autrui, et même de leur propre vie enfouie.

Ils se sont égarés à tout juger à leur aune  

et à sermonner leur moralité futile,

du haut du promontoire de leur ambition stérile.

C'est ce vertige illusoire qui les fait débouler.»


« Enfin, ceux qui n'entrent dans aucunes des deux premières catégories. Ceux-là peuvent rouler, ils sont libres de repartir.

On les voit parfois au pied de la fontaine, se désaltérant de la fraîche ondine. Ils savent qu'elle prend sa source tout en haut,

abreuvant par là même les verts coteaux que tu convoites.

Certains sont allés loin, mais l'ivresse des hauteurs les a surpris,

et déboussolés, ils ont confondu Sirius et Polaris.

Se retournant, ils ont perdu l'équilibre.

J'en vois d'ailleurs quelques-uns qui se sont accrochés aux vignes !

Mais j'ai assez parlé », lui dit-il, « poursuis ton chemin, maintenant,

je te connais …  »